❝ coma idyllique | Pv. Balthazar

La nuit commençait à tomber de plus en plus  tôt, me surprenant pour la première fois à la sortie du sport. Huit heures à peine, et déjà la lune était passée au dessus de la ligne d'horizon. Pourtant, je n'avais pas envie de rejoindre le chemin de chez moi. Pas encore. Il restait si peu de temps pour profiter de ces moments de brise fraiche, mais pas étouffantes, qui ne venais carresser nos joues que pendant les nuits d'août à Revelstoke. Le parc qui entourrait le dojo était l'endroit idéal pour apprécier ce moment de cérénité : à cette heure-ci, les passants avaient déjà regagné leur foyer, les cris des enfants avaient cessé, et il ne restait plus que le chant mélodieux de la levée de la nuit. Un moment idéal pour observer les étoiles dans l'herbe humide qui entourrait le complexe sportif. Et dans ce calme parfait, une seconde, juste une seconde, je séparais mon regard des constellations pour reposer mes paupières qui se faisaient de plus en plus lourdes.

Un cri. Aigüe, strident, qui perce la nuit, faute de percer mes timbant. Le ciel s'est éclaircit et la course des étoiles a bien progressé dans la voix lactée. J'ai dû m'endormir, et c'est l'esprit encore un peu embrumé que j'essayé de trouver l'origine de ce bruit qui m'a propulsé sur mes pieds. Tenant mon sac-à-dos d'une main, mon téléphone de l'autre pour me repérer grace à sa lumière, je progresse entre les arbres, entre les buissons, jusqu'à découvrir une silhouette trembottante aux abord de la fontaine. J'éteint l'écran de appareil, quand je vois le visage humide de la jeune fille se tourner vers moi. Ses yeux sont bien assez rouges comme ça, assez humidifiés par la frayeur qui la paralyse.

Moi-même, je me fige face à cette image. Les longues mèches rousses qui descendent sur ses épaules nues, le drapé de sa chemise de nuit recouvrant vaguement ses cuisses, et ses jambes fines vacillant dans une flaque bordeau. Tout ça, je ne le reconnais pas. Mais ce visage, lui, je l'ait déjà vu. Isadora, mais comme une autre personne. Comme une autre entité, mais plus frêle, et plus fragile que jamais.

S'il te plait... Ne pars pas.

Ses sanglots s'entendent encore dans sa voix érafflée. Ca serait presque assez pour faire monter mes propres larmes, mais je suis trop éberlué par cette vision ça. Si j'avance dans sa direction, c'est presque par automatisme, ce qui explique probablement mon pas hésitant quand j'arrive à son niveau et reprend enfin mes esprits. De plus près, je détaille avec plus de précision l'expression brisée de son visage. Démaquillée, en détresse, effrayée. Elle est tellement loin de la queen bee qui pavanne avec fierté à l'école. Et mon empathie fait tout le travaille à ma place. Je ne peux juste pas m'empêcher d'agir.

Sans un mot, sans un bruit, je me défais de mon bomber pour le passer sur ses épaules. Elle doit mourir de froid, dans cette tenue. Délicatement, je passe ses cheveux par dessus le vêtement, et guide ses pas jusqu'au rebord de la fontaine. Qu'elle reprenne son souffle, doucement. Attendre que ses sanglots s'espassent un peu plus, en s'asseyant à ses côtés. Je n'ai pas la moindre idée de ce qu'il s'est passé, mais la presser n'apportera pas plus de réponses. Alors je lui laisse le temps, n'oser la toucher que du regard, jusqu'à ce que sa respiration reprenne un rythme normale.

Isadora, c'est ça? Tu... tu veux bien m'expliquer? Quelqu'un t'as fait du mal?

J'essaye de les regarder le moins possible, mais je ne peux m'empêcher de jeter de bref coup d'oeils au liquide épais qui couvre ses pieds. Rien qu'à l'odeur, je peux affirmer avec certitude qu'il s'agit de sang, et je dois reconnaître que son origine m'inquiète. C'est une Banshee après tout...

Tu peux juste hocher la tête pour oui, d'accord? Si tu ne veux rien dire, tu peux rester comme ça aussi... Mais ça sera plus simple si je peux expliquer à la police si tu es en état de choc.