shallow waters

bla bla bla × bla bla bla × bla bla bla ×

qui aurait cru que ce n'était pas la pollution qui t'étoufferait en premier, mais plutôt la haine qui s'est logée dans ta gorge ? celle qui fait palpiter les branchies nichées derrière tes oreilles ; colère et rancoeur, frustration et vengeance, maîtres mots de ton existence qui s'amenuise de jour en jour.
tout allait bien jusqu'à ce que ça n'aille plus ; un bateau de trop qui s'abîme contre un rocher, déverse son funeste contenu dans les eaux déjà trop souillées. tes grands-parents se sont éteints, puis un oncle, une cousine, tes frères aussi, ils rejoignent le plan astral avant la fin de leur temps octroyé chez les mortels.
et tu n'avais rien pu faire, si ce n'est serrer les dents et nager avec le courant pour trouver un endroit qui n'avait pas encore été touché par ceux-ci. la tâche était devenue plus ardue, malgré tes efforts pour les empêcher d'envahir l'énième sanctuaire que ta famille avait investi. ni les murmures destinés aux kelpies, ni les épaves s'échouant sur les rives n'avait découragé les humains de vous repousser un peu plus vers l'océan, là où les vagues n'étaient plus aussi douces, aussi pures.
le sel rendait les choses plus difficiles ; respirer était devenu une corvée, ta voix s’écorchant sur une langue que tu connaissais pourtant que trop bien et les créatures que tu avais connues toute ta vie ne répondaient plus toujours à tes appels. il te collait à la peau, s'accrochait à tes cheveux devenus trop secs, mais si c’était le mal à supporter pour vivre en paix, tu étais prêt à en payer le prix sans aucune hésitation.
et c'est ce que tu t'étais dit, jusqu'à ce que le mal te rattrapes toi aussi ; s'infiltre et se propage. tu les détestes, eux, les afflictions qu'ils apportent et la destruction qu'ils sèment sur leur passage. tu regrettes l'époque où tout était plus simple.
où les réminiscences du passé, maintes fois racontées — puis finalement expirées dans le dernier souffle de tes aînés, avaient bercées les maigres espoirs que tu avais nourri en grandissant.
aujourd'hui, tu préfères t'asphyxier sur ta fureur plutôt que d'entretenir quelconques espoirs ; après tout, tu es condamné à mourir. un peu plus rapidement que les générations avant toi, un peu plus lentement que celles à venir.